La délégation israélienne est la plus surveillée des Jeux olympiques de Paris. Mais que sait-on des menaces qui pèsent sur les athlètes et des mesures mises en place pour garantir leur sécurité ?
Si le dispositif de sécurité qui entoure un événement international comme les Jeux olympiques est par nature exceptionnel, les 88 athlètes israéliens, et plus largement la délégation tout entière, font l'objet d'une surveillance particulièrement serrée. Cela au regard du contexte géopolitique actuel. Selon Israël, les menaces contre ses ressortissants à l'étranger ont fortement augmenté depuis les attaques du 7 octobre. Et le niveau de risque est jugé très élevé.
Depuis le début des Jeux, elles se sont surtout concentrée en ligne. Et à chaque fois, la réaction a été immédiate. Une enquête a été ouverte par le Pôle national de lutte contre la haine en ligne pour menaces de mort aggravées après des mails menaçants envoyés à trois athlètes israéliens, rapportait l'AFP dimanche 28 juillet. Le Parisien, de son côté, indique avoir appris que le groupe de lutte antiterroriste (GLAT) avait été saisi le 22 juillet et un adolescent interpellé après avoir publié sur le réseau social X un message dans lequel il commentait la venue en France du président israélien Isaac Herzog pour les JO, exhortant à « un attentat ».
Mails de menaces et doxing
Des athlètes israéliens ont aussi été victimes de « doxing ». Des informations à caractère personnel, telles que des identifiants et mots de passe ou encore des résultats d'analyses sanguines, se sont retrouvées sur la messagerie Telegram. D'autres données concernant cette fois des athlètes ayant été ou étant militaires avaient déjà fuité la veille sur la messagerie cryptée.
Si aucun incident majeur n'est à déplorer pour le moment, la tension qui entoure la venue des Israéliens pour les Jeux olympiques de Paris reste élevée. Cela car à Gaza, la guerre lancée par Israël contre le Hamas à la suite des attaques du groupe terroriste palestinien se poursuit, malgré les critiques internationales.
Les membres de l'équipe olympique d’Israël ont bien défilé sur la Seine, drapeau en mains, aux côtés des autres délégations lors de la cérémonie d'ouverture vendredi 26 juillet. Mais des huées se sont fait entendre dans le public sur leur passage.
En amont de l'événement, des voix se sont élevées pour demander l'exclusion d'Israël des JO ou qu'ils concourent sous bannière neutre, comme les athlètes russes et biélorusses. Un député de La France insoumise a créé la polémique en affirmant que les sportifs israéliens n'étaient « pas les bienvenus », aussitôt accusé par Gérald Darmanin « de mettre une cible dans le dos ». Alors que le ministre français de l'Intérieur s'était engagé à assurer la sécurité des athlètes israéliens lors des JO.
Samedi, quelques incidents ont émaillé le match de football Israël-Paraguay. Un groupe d'une dizaine d'individus « vêtus de noir, masqués et porteurs de drapeaux palestiniens ont déployé une banderole portant la mention "Genocide Olympics" » et l'un d'eux a mimé des « gestes à caractère antisémite », selon le parquet, qui là aussi a réagi en ouvrant une enquête pour provocation à la haine raciale aggravée. Classée « particulièrement sensible » par le ministère de l'Intérieur, en raison d'appels à la « mobilisation » contre la présence de la délégation israélienne, une rencontre entre Israël et le Mali avait mobilisé mercredi 24 juillet un millier de policiers et gendarmes. Elle s'est toutefois déroulée sans accroc majeur.
Présence d'agents du Shin Bet, géolocalisation, consignes strictes
La veille de la cérémonie d'ouverture, Israël avait mis en garde la France contre des menaces potentielles « d'attaques terroristes » contre ses athlètes et ses touristes par des groupes soutenus par l'Iran. Sans faire état de menaces précises, le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz avait écrit à son homologue français démissionnaire, Stéphane Séjourné, dans une lettre datée de jeudi 25 juillet dont une copie a été communiquée aux médias : « Nous disposons actuellement d'évaluations de menaces potentielles émanant de groupes terroristes iraniens et d'autres organisations terroristes visant à perpétrer des attaques terroristes contre des membres de la délégation israélienne et des touristes israéliens pendant les Jeux olympiques ».
Israël accusait par ailleurs l'Iran de « terrorisme numérique » visant à « susciter la peur » parmi la délégation israélienne. Pour rappel, Téhéran avait salué l'attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre, mais affirmé ne pas être impliqué.
Pour le moment, aucun lien n'a été fait entre ces diverses menaces et l'Iran. « Ce n'est un secret pour personne, ces Jeux olympiques sont un peu plus difficiles pour nous tous, mais nous avons pleinement confiance dans l'organisation de la sécurité », déclarait la présidente du Comité olympique israélien, Yaël Arad, en embarquant pour la France.
Concrètement, les athlètes israéliens présents aux Jeux bénéficient d'une sécurité personnelle 24 heures sur 24 assurée par des membres des unités d'élite de la police et de la gendarmerie françaises. Ces derniers accompagneront les sportifs, en tenue ou en civil, et ce, que ce soit à l'intérieur du village olympique à Saint-Denis, où ils logent comme la plupart des autres délégations olympiques. Tout comme à chaque sortie, sur le trajet et sur les sites des épreuves.
Mais pour les services chargés de la sécurité des athlètes, le travail a commencé bien avant, rappelait Michel Fauvergue, ancien député de la majorité présidentielle et ex-chef du Raid, sur l’antenne de RFI . « Les services travaillent en amont sur les délégations posant des problèmes de sécurité. Il y a un gros travail de renseignement qui se fait avec les pays d’origine, mais aussi avec d’autres pays. Tout renseignement international est toujours bon à prendre », expliquait-il. Une « mission compliquée », qui est l'objet d'une collaboration entre les services de sécurité nationaux et les services français, assure l'ancien policier.
L'ombre de l'attentat des Jeux de Munich 1972
Même si d'autres équipes nationales comme les États-Unis ou l'Iran, par exemple, c'est la seule délégation à faire l'objet d'un tel traitement. À ce dispositif s'ajoute, selon le quotidien britannique The Telegraph , des agents armés du Shin Bet, le service israélien du renseignement intérieur. Chaque athlète est aussi géolocalisé en temps réel, selon les informations de France Télévisions, même si chacun n'a pas son propre garde du corps, d'après le ministre israélien de la Cuture et des Sports Miki Zohar.
« On ne prend pas [la menace] à la légère, nous sommes en alerte maximale et tous les athlètes ont été informés de la situation », a commenté avant les Jeux le porte-parole du gouvernement israélien David Mencer. Le budget sécurité de la sécurité de la délégation aux Jeux a été doublé, selon le ministre de la Culture et des Sports dans Times of Israel.
« Nous faisons de notre mieux pour que les athlètes se sentent libres, mais aussi en sécurité et qu'ils n'aient pas peur. Nous ne voulons pas qu'ils remarquent trop les gardes », déclarait le ministre israélien de la Culture et des Sports dans The Telegraph. Selon Le Figaro , les consignes pour les athlètes sont tout de même très strictes : interdiction de sortir du Village olympique, de prendre le métro ou encore de parler hébreu en public. Et les services du Shin Bet ont recommandé aux athlètes de « quitter le Village olympique dans les 48 heures suivant la fin de leur compétition, de rentrer en Israël dès que possible, et de ne pas "céder à la moindre provocation". »
« Traditionnellement, la protection de la délégation d’Israël est renforcée, les effectifs sont rodés », assurait Michel Fauvergue sur RFI.
Au-delà du contexte actuel particulièrement incandescent, le souvenir des attentats de Munich en 1972 reste très vif pour les délégations olympiques israéliennes. Un commando terroriste palestinien baptisé « Septembre noir » avait pris en otage des membres de la délégation israélienne dans le village olympique. Onze athlètes avaient été tués. La sécurité des JO a été fortement renforcé depuis cet événement. Avant le début de la compétition, Times of Israel rapportait que 15 athlètes de la délégation avaient reçu des messages de menace par mail ou par téléphone, certains indiquant : « Si vous venez, sachez que nous avons l’intention de répéter les événements de Munich 1972 », disent notamment ces messages.
Une cérémonie devait d'ailleurs se tenir avant la cérémonie d'ouverture en l'hommage des athlètes tués à Munich. Mais elle a finalement été repoussée pour des raisons de sécurité.
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